Chapelle Saint-Roch

En quittant Paliseul, au croisement des routes de Maissin et Bertrix, Verlaine longeait la chapelle Saint-Roch, ombragée d’un tilleul séculaire, aussi ancien, semble-t-il, que l’oratoire édifié en 1636. Cet arbre impressionnant et exceptionnel par son âge, plus que tricentenaire, fut classé au patrimoine avec l’ensemble du site en 1982. Mais il ne résista point à la tempête de 1999, en dépit des arceaux métalliques qui l’arrimaient aux deux frênes voisins. Le tilleul rendit finalement l’âme, à l’âge vénérable de 363 ans! Il est vraiment des arbres tutélaires, qui traversent et défient le temps.

Tout un peuple habite le tilleul, arbre mellifère par excellence: le peuple des abeilles – ou les « avettes ». Il leur offre un véritable butin de nectar aux alentours du solstice d’été, à la St-Jean.
Au printemps, le tilleul reprend vie: il nous berce toujours par le léger bruissement de ses branches et de son écorce, avec toutes les mélodies de ce monde infime.
Au premier ensoleillement, le tilleul s’enveloppe comme d’une écume effervescente due au bouillonnement des vols de milliers d’abeilles.
Un bourdonnement affairé, un parfum délicat et euphorisant gagnent toute la cime de l’arbre, dans la splendeur et la générosité de sa floraison.

Dans une lettre à E. Blémont, Verlaine se plaisait à citer quelques vers de la plume de Marceline Desbordes-Valmore:

Si l’enfant sommeille
Il verra l’abeille

Quand elle aura fait son miel
Voler entre terre et ciel.

Origine de la chapelle.
Au XVIIe siècle, la contrée dévastée par la guerre devint un terrain idéal pour la propagation de la peste. En 1636, les survivants paliseulois érigèrent une chapelle votive en l’honneur de Saint-Roch, pour remercier le ciel pour la fin du fléau et pour en être préservés à l’avenir. En ce lieu, le jeune Verlaine serait aussi venu implorer le saint afin d’être délivré de la peste du mariage. Mais ceci est sans doute une autre histoire…

L’enterrement

Je ne sais rien de gai comme un enterrement!
Le fossoyeur qui chante et sa pioche qui brille,
La cloche, au loin, dans l’air, lançant son svelte trille,
Le prêtre en blanc surplis, qui prie allègrement,

L’enfant de chœur avec sa voix fraîche de fille,enterrement
Et quand, au fond du trou, bien chaud, douillettement,
S’installe le cercueil, le mol éboulement
De la terre, édredon du défunt, heureux drille,

Tout cela me paraît charmant, en vérité!
Et puis, tout rondelets, sous leur frac écourté,
Les croque-morts au nez rougi par les pourboires,

Et puis les beaux discours concis, mais pleins de sens,
Et puis, cœurs élargis, fronts où flotte une gloire,
Les héritiers resplendissants!

Extraits de Poèmes saturniens.

 

le ciel est par- dessus les toits

Le ciel est, par-dessus le toit,
Si bleu, si calme!
Un arbre, par-dessus le toit,melancolie
Berce sa palme.

La cloche, dans le ciel qu’on voit,
Doucement tinte.
Un oiseau sur l’arbre qu’on voit
Chante sa plainte.

Mon Dieu, mon Dieu, la vie est là
Simple et tranquille.
Cette paisible rumeur-là
Vient de la ville.

Qu’as-tu fait, ô toi que voilà
Pleurant sans cesse,
Dis, qu’as-tu fait, toi que voilà,
De ta jeunesse?

Extraits de Sagesse.